vendredi 4 octobre 2013

1476.Ep3. Printemps pour Mécontents

Les premiers d’entre eux furent les deux jeunes fils de François de Bretagne. Jean VI, le fils légitime, âgé de 13 ans, vit son emploi du temps chamboulé dés l’annonce du mariage Valois-Bourbon. Les dames de compagnie de Gabrielle de Bourbon le kidnappèrent le matin des premiers bourgeons et le conduisirent auprès de la duchesse. La duchesse avait fait débarrasser une salle du château de Nantes pour y installer une cour factice et on avait engagé un maître de danse pour 4 mois de leçons intensives. Ainsi, le jeune jean dut chaque matin pratiquer quatre heures durant l’art de la discussion, celui de la danse et des bonnes manières. Auprès des dames de Gabrielle, il s’essaya à la parole courtoise déclenchant maints fou-rires et de très rares pamoisons. Ayant perdu sa mère tôt, le jeune héritier manquait de raffinement. Avant le remariage du duc, la présence féminine autour de lui était rare et s’était résumé à quelques servantes mal dégrossies et aux femmes de ses maitres ou des membres de la Confrérie. SI, à Clisson, où siégeait la confrérie, ces dames de Bretagne se voulaient les arbitres du bon goût. A la cour ducale, elles paraissaient toutefois bigotes, précieuses et ridicules par rapport aux dames de compagnie de la duchesse. A la cour de France, elles auraient été l’objet des quolibets de toute la noblesse française. Pour Gabrielle, il n’était pas question que son beau-fils subisse ce genre d’insultes, surtout lors du mariage d’un parent avec une fille de France. Elle avait donc insisté auprès du duc pour policer le comportement de l’héritier. Ainsi, en ce printemps 1476, Jean passa les premiers beaux jours à l’apprentissage ardu de l’élégance et à l’essayage fastidieux de son trousseau de cour et de sa tenue de cérémonie. Pourtant, il ne se présentait pas sans arme à la cour de France. Habile aux armes sans être exceptionnel, bon cavalier comme il sied à tout noble, Jean, âgé de 13 ans, possédait une formation atypique pour l’époque. Il suivait régulièrement des leçons données par des maitres de l’Université. Il savait écrire et lire en latin et en français tout en étant capable de tenir une conversation en breton et il s’intéressait en particulier au droit. Son père ne comprenait pas cet engouement pour les connaissances universitaires mais le tolérait tant qu’étaient remplies les obligations c du jeune duc. Dans cérémonielles et militaires du jeune duc. Dans ces dernières, de petite taille, Jean s’entêtait à affronter plus fort et plus habile que lui. François II louait cet acharnement mais redoutait que les passions de son fils le poussent à l’intransigeance, notamment envers son demi-frère François d’Avaugour. François, Bâtard de Bretagne, avait poursuivi son entraînement militaire auprès de la confrérie. Relégué à Clisson depuis le début de son adolescence, il suivait un enseignement militaire qui allait devenir la base de la formation des officiers des bandes. Latin, Français, Breton n’étaient qu’abordés tandis que mathématiques, fortifications et arts mécaniques étaient au programme. François II comptait faire de son bâtard un des bras armés du duché, le premier ingénieur militaire non italien. Mais, en ce printemps 1476, François d’Avaugour qui avait espéré participer aux réjouissances du mariage Bourbon-Valois, apprit qu’il devait s’embarquer pour l’Irlande. Le duc voulait qu’il y reçoive son baptême du feu sous la direction d’hommes de guerre expérimentés et exemplaires comme les Tudors. Pour faciliter les choses, il lui offrit un nouvel équipement et déclara qu’une bonne épée était forgée aussi dans le sang. François II ne lui confia pas qu’il préférait le savoir loin de la France et de son machiavélique et très fortuné roi qui aurait pu allumer quelques ambitions désastreuses dans l’esprit d’un jeune bâtard influençable. Le roi en question ne débordait pas de joie en ce printemps. Les nouvelles de l’est étaient bonnes mais la venue de Jean de Rohan à Plessis les Tours avait gâché la fin du carême et les fêtes de pâques. Le duc de Bretagne l’avait envoyé renégocier les contrats des bandes. Leur compétence reconnue faisait des mercenaires bretons des hommes recherchés. Louis XI leur faisait autant confiance qu’aux suisses et les considérait bien plus solide que ses francs-archers. Mais, à partir du mercredi des cendres, il avait découvert un nouvel aspect des Bretons. Ils étaient durs en affaire. Vantant les réussites des bandes, des corsaires, de la flotte du Ponant et la fidélité du duc de Bretagne, Jean de Rohan négocia le plus âprement qu’il put les nouveaux engagements. Le Roi tenta d’abord de l’acheter en faisant allusion à des titres prestigieux, à des pensions mirifiques ou à des sommes faramineuses. Mais Rohan refusa. Quand Louis passa aux menaces voilées, le vicomte ne fit qu’exprimer, en souriant, son espoir de passer de longues semaines dans ses fiefs, tous hors du royaume de France à attendre la naissance de son deuxième enfant et à régler ses propres affaires. Les instructions du Duc étaient claires. D’une manière ou d’une autre, le roi devait payer toutes les promesses non tenues depuis 1473. Jean devait prendre son temps et récolter au passage un maximum d’informations sur la cour de France. Si certaines vieilles familles le traitaient en privé de maquignon pour sa rapacité commerciale, la réputation de sa famille, ses moyens financiers et son excentricité lui ouvrirent les portes de la noblesse française. Il débuta ainsi une série de correspondances avec des seigneurs d’ile de France, du Maine, de Provence, d’Anjou et d’Auvergne. S’appuyant sur ces sources d’information ainsi que sur la présence de Michel Landais à Lyon, Jean de Rohan envoya chaque semaine, jusqu’à l’été, un courrier en Bretagne. Il y donnait instructions commerciales, conseils de gestion de fiefs et fermes ordres de repos à sa femme. François II, son beau-frère, y lisait, lui, l’état des finances royales, de l’armée française, des factions à la cour de France et l’évolution de la guerre en Bourgogne.. Ainsi, début juin, Jean de Rohan fut le premier à apprendre la chute de Nancy. La garnison bourguignonne n’ayant pas été payée depuis des lustres, se rendit à Renée de Lorraine qui les assiégeait mollement. Louis XI s’en réjouit et décida de profiter de l’occasion. Il accepta les exigences de Jean de Rohan. Louis paya le double pour recruter les bandes. Il voulait absolument des troupes aguerries pour encadrer les piétons français. Lourdement escortée, une caravane achemina l’or français à Nantes. Rohan était encore à la cour de France lorsqu’arriva la St Jean. Dans un très rare accès de sincérité, Louis XI lui demanda ce qu’il désirait pour devenir son homme. Le vicomte lui répondit qu’aucun roi de France ne voudrait lui accorder ce qu’il avait obtenu du duc. Le roi en resta coi.
Banquet au XVè siècle.

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